Deux gamins formés au club de basket de Pont-l’Evêque (Calvados), médaillés aux JO : leur performance est historique, l’histoire est folle, et on ne se lasse pas de la raconter ! De leurs débuts, relatés par leurs entraîneurs de l’époque, à leur ascension, et leurs venues sans chichis en passant par leurs coups de pouce… Retour sur les liens qui unissent les deux stars du basket au club pontépiscopien.
Au club, le duo « comme à la maison » ; loin des yeux, leur cœur à Ponpon
C’est à se demander qui du fromage ou du basket fait la réputation de Pont-l’Évêque (Calvados) dans le monde. Sébastien Monnier aime à le dire : Nicolas Batum et Marine Johannès ont « replacé la ville sur une carte ».
Fiers d’être de Pont-l’Evêque, es deux stars du basket n’ont pas oublié le club de leurs débuts et même, « ils le rappellent et le revendiquent ! » Lors des JO de 2016 et de 2020, le duo envoie un selfie au président du club.
« Il n’y a pas besoin d’en dire plus, tout est dit. »

Quand Nicolas Batum reçoit la médaille d’honneur de la ville de Pont-l’Evêque en 2014, il assure que celle-ci est « la plus importante » à ses yeux. « C’était une cérémonie sans chichis, juste le retour d’un jeune de retour chez lui », rappelle Sébastien.
Les deux joueurs, nés à Lisieux, reviennent régulièrement dans leur pays d’Auge. Marine, celles de Bonnebosq, et Nicolas, de Pont-l’Evêque. « C’est leur maison ici, ils viennent se mettre au vert, renouer avec leurs racines, se recentrer. »
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Profondément attaché au club, le duo aime à lui faire profiter de sa lumière. En participant régulièrement à des événements, comme un stage dans le gymnase qui les a vus grandir. Ces étoiles, aussi brillantes soient-elles, sont loin du bling-bling. Ici, Batum est Nico, et Johannès est Marine.
« Quand il est là, Nico redevient le gamin qu’il était. Et il est capable de rester jusqu’à ce que chaque enfant ait son autographe ou sa photo »
Il y a aussi les visites moins formelles, comme cette fois où Nicolas a débarqué à l’improviste lors d’un entraînement. Ici, le basketteur donne de son temps avec plaisir. « Si quelqu’un le croise dans la rue, je pense qu’il est prêt à discuter avec n’importe qui. C’est un profond gentil au grand cœur. »

Marine, d’un tempérament plus discret, n’est pas moins liée à son club. « Elle passe régulièrement. L’année dernière, elle s’est même entraînée ici pendant le confinement », rappelle le président. À la fois proche et fan, Sébastien connaît la jeune femme sous un caractère plus ouverte et « chambreuse » dans le privé.
Les deux basketteurs font également profiter le club de leurs moyens, comme l’année dernière, lorsqu’ils ont offert des paniers de basket aux écoliers de la communauté de communes. Nicolas Batum, parrain du club, lui reverse ses primes de match de l’équipe de France.
“Cela nous permet de développer le club, de créer une dynamique, et de maintenir les emplois. Tout ce qu’il fait, c’est de bon cœur, naturel, et sans se sentir redevable.”

Loin des yeux, Batum suit de près l’actualité des clubs de la région et de celui de son cœur. « Il nous suit tout le temps sur les réseaux et réagit régulièrement », raconte Sébastien.
A l’inverse, le président aime connaître le sentiment de ses deux pépites sur les orientations du club. Comme lors du changement de nom, du PLPAB pour devenir Pays d’Auge Basket, lors de la fusion avec Touques. « Nico et moi avons la même vision, celle de la formation et de l’encadrement, il a compris la démarche », explique le président.
Car gommer le nom de Pont-l’Evêque n’effacera pas la folle histoire du club. Déjà marquée par André Even, pur produit pontépiscopien, médaillé aux Jeux Olympiques de Londres 1948, la première de l’histoire. « Il y a une bonne étoile sur le club depuis le début, ou quelque chose sous cette salle. En fait, ça ne s’explique pas, il faut le vivre », nous confiait Sébastien lors de notre rétrospective des 80 ans du club.
Si l’un des gymnases de Pont-l’Evêque a été baptisé « Even », Batum et Johannès n’ont encore rien en leur nom, dans leur ville. « Nicolas est aujourd’hui le joueur le plus titré du basket français, il va falloir réfléchir à une reconnaissance à la hauteur de leur carrière. » Alors, des idées ? !

« Nico, tout le temps un ballon à la main, montrait déjà son altruisme »
« En arrivant, Nicolas avec déjà des rêves de pro, mais de là à penser qu’il aurait cette carrière là… » Philippe Couesnon, alias Titus, a entraîné le basketteur lors de sa formation au club pontépiscopien de ses 3 à 11 ans.
Un gamin « un peu introverti » et discret, qui n’aime pas se mettre en valeur. Sur le terrain comme à la ville, les joueurs forment une bande de copains. « Ils étaient 7 à être constamment ensemble, à se retrouver pour jouer. A cette âge, la taille est prépondérante, il suffit de leur donner le ballon et ils sautent. Ils ont tous évolué en national après ; cette génération était vraiment au dessus », raconte Titus, alors jeune entraîneur.
A l’époque, le petit Nicolas respire et vit basket. Même en solo. « Ce qu’il voulait, c’était passer le plus de temps à jouer même quand la salle était fermée. Il avait un panier chez lui, on le voyait rarement sans ballon », se souvient Titus. « Il était déjà influencé par l’univers de la NBA ; c’est l’un des premiers à avoir eu des t-shirts, posters etc », ajoute Sébastien Monnier, l’actuel président du club.
Avec Titus, Nicolas touche à tous les postes. « Il n’était pas bon sur l’aspect défensif, cette génération ne défendait pas. Ca m’a fait rire quand il a été considéré comme le meilleur défenseur quand il est arrivé à Portland », sourit-il.

Si Nico déteste perdre, lui et son équipe jouent avant tout pour apprendre. Lors des temps morts, Titus observe la place de chacun dans le groupe. « Au départ, il était plus spectateur qu’acteur dans l’analyse, peut-être un peu moins pertinent que les autres, mais ce ne sont que des gamins. » Jusqu’à s’affirmer davantage, et il fallait parfois le remettre en place. « Il le prenait assez mal, il se remettait en question sur le banc, pleurait un peu, et c’était reparti », raconte Philippe.
Le futur Batman montrait déjà ses valeurs de générosité et de bienveillance. « Il a toujours été altruiste, il ne pensait pas qu’à lui », affirme Titus. En contre attaque, même tout seul, il attendait qu’un coéquipier vienne pour le faire marquer. Ou si un adversaire prenait le dessus sur l’un d’entre eux, il allait « chercher son joueur pour l’aider ».
Titus, « fier » et « ému » du parcours de Nico, ne le starifie pas pour autant. « C’est seulement quand on va aux Etats-Unis, où je l’ai vu à Charlotte il y a trois ans, qu’on se rend compte de son statut là-bas. Mais c’est quelqu’un de simple, d’humble, il ne joue pas à la star », confie-t-il. Ce jour-là, l’échange entre les deux hommes dépasse les frontières du basket. « Je ne parlais plus à un gamin, mais à un adulte, à un père. »

« Marine se métamorphosait sur le terrain, c’était un phénomène »
Si Nicolas Batum a commencé le basket en marchant dans les pas de son père, Marine Johannès n’était pas prédestinée à une telle carrière. « Marine n’est pas issue d’une famille de basketteurs, comme c’est souvent le cas. Elle était venue à l’inscription au club avec sa sœur, et finalement, c’est elle qui a signé », raconte Jérôme Duval, son entraîneur à Pont-l’Évêque de 2005 à 2007.
La seule à exprimer dès l’âge de 11 ans, qu’elle souhaite atteindre le plus haut niveau, celui des pros. Et surtout, qui se donne les moyens de ses ambitions. Bosseuse, Marine travaille en dehors des entraînements et s’inspire des plus grands.
« Elle était très demandeuse, travailleuse, allant au-delà des consignes, et compétitrice. Je sais qu’elle regardait beaucoup de DVD de Tony Parker, ou d’autres joueurs pros, elle se nourrissait d’eux. Elle arrivait la première aux entraînements, et il lui arrivait de rester jouer avec les filles plus âgées ou de faire un 1 contre 1 contre des garçons. »
Une passion qu’elle développe en dehors du club, jouant chez elle, et même chez les copines. « Aux anniversaires, elle préferait jouer au basket que participer aux jeux classiques », se souvient Sébastien Monnier, l’actuel président du club.
Si Marine s’amuse, elle n’est pas là pour loisir, mais pour gagner. « Elle supportait mal l’échec », rappelle Jérôme. La fillette, au tempérament discret et timide, montre déjà son double sur le terrain. « Dès qu’elle entrait, elle se métamorphosait, c’était impressionnant. » Malgré sa petite taille et son corps frêle, la blondinette marque les esprits.
« Elle avait déjà un jeu atypique, elle joue « comme un garçon », un jeu offensif et agressif. Aujourd’hui, on le voit encore. Elle est unique et crée de l’émotion », assure son ancien entraîneur.

À tel point que la petite Johannès, portant le numéro 6 ou 8, se fait vite sa réputation. « Elle ne faisait pas peur au premier abord, mais au bout de quelques minutes sur le terrain, tout le monde comprenait. » À la fin des matchs, les coaches adverses commentent son jeu :
« ils me disaient : wow, c’est un petit phénomène. »
Une mentalité de bosseuse, doublé d’un jeu unique, son potentiel fait penser à son coach qu’elle pourrait aller très loin. Jérôme Duval se souvient de son premier stage de détection, en 2007, où elle se fait approcher par le club de Mondeville. Avec sa maman, qu’il décrit comme « sa première supportrice », « on avait des petits doutes, car elle est très proche de sa famille. Mais on savait que si elle dépassait ce cap de quitter le nid, sportivement, ça allait le faire », explique-t-il.
Alors jeune entraîneur, il se dit même soulagé qu’un grand club la prenne sous son aile, « n’ayant pas le potentiel pour le faire comme jeune entraîneur ». Face à son parcours, Jérôme Duval se dit « chanceux » d’avoir entraîné Marine Johannès.
« Je pense que ça n’arrivera plus jamais de retomber sur une joueuse comme ça. »
Crédits photos : Le Pays d’Auge ; Pays d’Auge Basket ; Bigup Sport.
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